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SIPM
Un autre Monde est possible
Section Le Monde
mercredi 12 novembre 2003
Des salariés du Monde (le journal et le groupe) décident de travailler à l’implantation d’une section syndicale CNT. Pour les luttes qui s’annoncent, il faut un syndicat de combat.
Confédération nationale du travail
Section interprofessionnelle du groupe Le Monde
Courriel : lemonde@sipm-cnt.org
Syndicat interprofessionnel de la presse et des médias (SIPM-CNT)
33, rue des Vignoles 75020 Paris
Courriel : presse.rp@cnt-f.org
C’est une « petite » surprise pour certains, un secret de Polichinelle pour d’autres, mais les syndicalistes au chat noir hérissé de la CNT sont présents au sein du groupe Le Monde.
Un nouveau syndicat ? Un syndicat « de plus » ? Un coup politique de quelques-uns ? Non. La section interprofessionnelle de la CNT au sein du Monde représente l’expression de salariés indépendants de quelque autorité que ce soit. Personne ne nous a inventés, personne ne nous manipule ou télécommande.
Devant l’avenir incertain de l’entreprise Le Monde, contre les corporatismes qui gangrènent les métiers de la presse pour le plus grand bonheur des patrons, des salariés ont choisi la CNT.
De la précarité dans la presse
Il est toujours cocasse de lire dans les quotidiens nationaux de grandes enquêtes sur la précarité dans le monde du travail. Cocasse car cette même précarité est devenue une constante de la presse, sous diverses appellations dont celle de pigiste. Quelques chiffres : en 1980, 9,6 % de pigistes ; 19 % début 2000, soit une augmentation de 276 % en vingt ans alors que le nombre de journalistes n’augmentait que de 90 %. Les résultats de ce développement de la précarité sont multiples : baisse des rémunérations, remise en cause de la couverture sociale minimum, droits du travail peu ou pas respectés, etc. Sans compter le véritable contrôle social de l’information exercé par les directions lors des commandes de papiers.
Marchandisation
Le pigiste se voit obligé d’entretenir un rapport marchand permanent avec son travail. Au revoir la qualité, au revoir l’indépendance minimale de liberté de ton. Bonjour la course au papier, bonjour la course à la feuille de paie... Soulignons aussi que le « statut » de travailleur précaire s’est largement « ouvert » au secrétaire de rédaction (SR) payés, eux, non pas au feuillet mais à la journée.
À qui profite le « crime » ? Aux patrons qui souhaitent limiter les embauches en CDI, avoir moins de salaires fixes, de cotisations sociales à payer ; aux patrons qui souhaitent avoir des salariés flexibles en fonction des besoins de l’actualité.
Soulignons aussi que l’éparpillement des pigistes (non-présence au sein des rédactions) rend difficile toute velléité d’organisation et de riposte syndicale, sans oublier la peur d’être éjecté en étant mêlé à des actes susceptibles d’être « mal perçus » par l’exécutif de la rédaction.
Quant aux plans sociaux (tant à la mode actuellement dans de nombreux titres), les pigistes en sont souvent les premières victimes, silencieuses, partant généralement sans licenciement économique comme le droit du travaille précise pourtant.
À société précarisée, presse précarisée ? Le constat est évident. Le Monde n’échappe pas à cette règle avec ses secrétaires de rédaction « CDD structurels » en violation du Code du travail, avec son armée de pigistes, ses ouvriers du Livre intérimaires (« rouleurs ») dont on a récemment vu que leur titularisation (« piétonnage ») ne se fait pas sans rapport de forces.
Sans parler de l’espèce corvéable à merci que l’on utilise massivement et gratuitement entre juin et septembre, les stagiaires. Pour la CNT, l’évolution des métiers de la presse (ouvriers, journalistes, employés), au Monde comme ailleurs, ne peut s’effectuer par le développement de la précarité, de
la sous-traitance et par l’antagonisme des corporatismes. Derrière la lutte contre la précarité, c’est la survie même des acquis de l’ensemble des salariés qui se joue.
La lutte solidaire, ça marche !
Nous saluons les correctrices et les correcteurs du quotidien Le Monde, qui viennent, fin septembre, de briser le découragement qui se généralise en presse parisienne. La solidarité des « piétons » (titulaires) avec une « rouleuse » (remplaçante) a été décisive et la direction de l’entreprise a cédé. Le mouvement social du service de correction dans son ensemble (cadres compris) a trouvé un écho, de l’intérêt et de la sympathie dans bien d’autres services du journal, touchés par la précarisation. Les ouvriers du Livre et leurs organisations syndicales se sont heureusement montrés solidaires.
Les cénétistes feront tout pour que les luttes sociales dépassent dans la presse les divisions corporatistes et catégorielles. Nous espérons, par exemple, que les correcteurs du Monde sauront exprimer leur solidarité avec les précaires de la rédaction aussi bien qu’avec les correcteurs des titres filialisés. La CNT tissera pour cela des liens interprofessionnels. Le Monde devenant un groupe de presse, il nous faut aussi rencontrer les salariés des filiales et unir nos luttes contre les disparités de salaires, de conditions de travail, de statuts...
Nous devons construire un réseau de lutte et de solidarité sur la base de la souveraineté des assemblées et de la révocabilité des mandats. Dans les entreprises de presse comme ailleurs, les principes d’auto-organisation de la résistance à l’exploitation sont les moyens et les fins du mouvement d’émancipation sociale.
C’est tout le sens de la création de cette nouvelle section syndicale.