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Publié dans le Combat syndicaliste n°346 - Janvier 2010
Nouvel impact syndical : création d’une section dans la presse médicale
dimanche 7 février 2010
Après Wolters Kluwer France, c’est le groupe Impact Médecine qui a le « bonheur » de voir arriver le syndicat de la presse de la CNT (SIPM). En effet, un représentant de la section syndicale a été désigné le 5 novembre dernier et commence sur les chapeaux de roue, par une petite dénonciation en règle de la gestion financière de l’entreprise, à coups de LBO, un bel outil patronal de maximisation des profits au détriment des salariés.
Avant tout, petit retour sur Impact Médecine. C’est un groupe de presse médicale qui publie deux hebdomadaires, Impact Médecine et Impact pharmacien et des mensuels ou bimestriels, Abstracts, Synoviale, Genesis, AIM, Cancers, etc.
Les salariés sont passés de cent vingt à soixante-dix suite à deux LBO. Mais qu’est-ce qu’un LBO ?
LBO : Licenciements bien organisés ! (1)
Le LBO (Leverage Buy Out ou Capital Transmission) est une opération financière spéculative qui permet à un ou plusieurs actionnaires historiques d’une société de revendre leurs parts en transmettant la majorité du capital de l’entreprise à de nouveaux actionnaires (sociétés d’investissement, fonds de pension, etc.) associés à des cadres dirigeants. Les LBO touchent plus de un million de salariés en France et plus de quatre mille entreprises (Cegelec, Legrand, Gerflor, Picard, Ipsen, etc.). Certaines ont connu plusieurs LBO : deux pour Eurofarad, TDF et Impact Médecine.
Les spécificités de cette opération sont :
• un investissement minimum ;
• un financement par l’emprunt important ;
• une rentabilité maximum sur le court terme.
Contrairement aux opérations classiques permettant aux actionnaires de bénéficier d’un revenu régulier de leur capital, dans un LBO, il faut considérer que l’entreprise achetée a pour seule vocation d’être revendue comme une simple marchandise pour en tirer un profit substantiel. Le crédit bancaire accordé n’est donc plus seulement un prêt sur revenus mais il devient un prêt sur gages. Pour rembourser rapidement l’emprunt, il va donc falloir accroître de manière significative le résultat de l’entreprise rachetée, non pas comme un actionnaire de long terme, mais comme un spéculateur. Avec deux objectifs : revendre très vite et très cher.
LBO destructeurs d’emplois
Pour maximiser leurs rendements à court terme, les LBO conduisent notamment les entreprises à minimiser les coûts (pression salariale, absence d’investissements), vendre les activités non rentables et mettre en place des plans sociaux ou des délocalisations.
« Une étude, présentée au forum de Davos en janvier 2008 et passée plutôt inaperçue, critique l’impact des LBO sur l’économie. […] Portant sur cinq mille entreprises américaines entre 1980 et 2005, l’étude montre que, cinq ans après leur rachat par un LBO, les entreprises emploient 10 % de salariés en moins par comparaison à leurs homologues qui ne sont pas passées par le giron d’un financier. Rapporté à la taille de l’échantillon, la différence est de 340 000 emplois. Au total, un quart des salariés sous LBO voit leur unité de travail fermée, vendue ou restructurée. Un taux deux fois plus élevé que dans une entreprise « normale ». Autre effet pervers, les fonds de LBO contractent de fortes dettes pour acheter les entreprises. Résultat, ces dernières ont deux fois plus de risques de faire faillite. » (Bakchich.info, 19 juin 2008).
La législation actuelle n’est pas favorable aux salariés, notamment dans la lutte contre les LBO. Les financiers, investisseurs ou banquiers, sont en effet juridiquement considérés comme n’étant pas responsables de la politique économique qu’ils ont pourtant initiée dans l’entreprise qu’ils détiennent directement ou indirectement.
Les LBO chez Impact Médecine
Le groupe Impact Médecine a connu un LBO en 2004 puis un nouveau en 2007, lors de la redistribution du capital (LBO qui n’osait pas dire son nom… mais la CNT, encore « clandestine » à l’époque, avait lancé l’alerte auprès des syndicats, du CE et des salariés). Avec ce deuxième LBO, comme d’habitude dans ce type de montage financier, ce sont des licenciements qui ont été mis en avant alors que d’autres solutions étaient envisageables : rééchelonner la dette bancaire du LBO sur une durée plus longue et un taux plus bas, afin de faire des économies en réduisant le service de la dette ; envisager un report d’échéances, pour permettre à l’entreprise de respirer « financièrement » ; réduire le train de vie de la direction pour participer aux réductions de coûts…
Les conséquences du LBO aujourd’hui
Cinq licenciements ont eu lieu (été 2009) sur les huit annoncés. L’annonce publique des licenciements par la direction aux salariés a été l’occasion de lui faire avouer qu’il s’agissait bien d’un LBO…
Comme le font remarquer les représentants actuels des salariés (de nouvelles élections auront lieu en mars), la dégradation des conditions de travail se fait déjà sentir depuis la rentrée ! Pour le SIPM-CNT, il est clair que le plan de licenciements n’a pour objet que de reconstituer la marge de profitabilité, alors que le besoin d’effectifs est réel.
Les réponses de la direction sont particulièrement floues sur l’avenir du groupe Impact Médecine. La vente ou l’intégration dans un groupe est probablement plus ou moins proche. Ce qui expliquerait les licenciements « préventifs » et ceux évoqués récemment. Nous sommes bien dans le « capitalisme antisalarial » ou « de déréglementation à dominante financière » (F. Lordon, La crise de trop, Fayard, 2009).
Il faut rappeler aux actionnaires et aux financiers que les salariés ne sont pas que des chiffres dans des tableaux ni des « variables d’ajustement » ou des pions que l’on déplace. Et que leur logique financière à court terme, si elle va dans le sens de leurs intérêts particuliers, est contraire aux intérêts même de l’entreprise et surtout de ses salariés.
Le SIPM-CNT appelle donc les salariés du groupe Impact Médecine à se préparer à affronter les événements qui surviendront dans les semaines et les mois à venir et à être prêts à se mobiliser afin que ce ne soit pas les salariés qui paient encore les conséquences de choix purement financiers. Nous œuvrerons dans ce sens à un travail intersyndical avec les autres organisations présentes dans l’entreprise.
Section syndicale Impact Médecine • SIPM-CNT
(1) La section syndicale SIPM-CNT Impact Médecine travaille étroitement avec le Collectif LBO (http://www.collectif-lbo.org).