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Lettre du préfet à la SACIJO
Mise en ligne par la section JO du SIPM-CNT
dimanche 20 juin 2004
Lettre du 7 juin 2004. Division des catégories : attaque ciblée contre les correcteurs.
Les passages intéressants sont en gras, les remarques de la section en ital.
Le préfet, directeur des Journaux officiels
Monsieur le président,
dans le cadre de l’examen concerté des conséquences de la dématérialisation sur les tâches à accomplir, un groupe de travail mixte DJO-SACIJO a remis des conclusions techniques sur les débats parlementaires et le BOAMP, premières publications concernées par ces évolutions.
Et voilà comment on utilise la paritarisme pour justifier des décisions parfaitement unilatérales ! Comme si ce « groupe de travail mixte » avait eu une quelconque influence sur les décisions finales (ou alors, il y a des questions à se poser !)
Un certain nombre de conséquences en matière de processus de production doivent en être tirées.
Il m’appartient, aux termes de la Convention du 28 mai 1997, qui me donnent compétence pour charger la SACIJO des différents travaux correspondant aux missions de service public de la DJO, de les arrêter, et de vous demander de les mettre en oeuvre.
C’est l’objet du présent courrier et des schémas joints.
S’agissant en premier lieu des débats parlementaires, les opérations de saisie à la source et de transmission de fichiers, mises en place tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, en liaison avec nos services, apparaissent parfaitement maîtrisées.
Après la période initiale de calage, qui sera bientôt achevée pour le sénat comme elle l’a été pour l’Assemblée, il se confirme que la qualité des fichiers transmis permettra de s’en tenir après les ajustements résiduels de forme éventuels, à un simple pointage de la mise en page, comme nous l’avions envisagé.
En conséquence, dans le cadre de la décision des assemblées de nous délivrer un « bon à tirer direct », et dans l’optique de réduire effectivement et [sic] les délais de publication conformément aux attentes exprimées fortement par les assemblées, il ne sera plus nécessaire de faire procéder à une lecture pour correction.
Autant le dire tout de suite, c’est un courrier spécial : liquidation des correcteurs. Si vous n’aviez pas deviné.
S’agissant en second lieu du BOAMP, les constats faits sont moins satisfaisants et conduisent donc à engager des actions correctives.
des « actions correctives » pour liquider les correcteurs, c’est fin !
Il est indispensable d’optimiser dès que possible les traitements informatiques pour améliorer les conditions de saisie par les annonceurs et de traitement des données ainsi saisies à la source, qui sont actuellement très médiocres.
J’ai donc donné des instructions en ce sens aux services compétents de la DJO, qui ont entrepris et réaliseront, en liaison avec les ateliers de la SACI, tous les développements possibles sur CCI pour obtenir progressivement de meilleurs résultats.
Je souhaite que cette démarche soit menée avec soins et dans les meilleurs délais.
A moyen terme, la future plate-forme de production éditoriale apportera des réponses mieux appropriées à une dématérialisation complète du processus.
Mais sans attendre la finalisation de ces mesures, il est nécessaire et possible d’engager dès maintenant la simplification du processus de production.
Deux évolutions me paraissent s’imposer :
– l’examen technique qui a été fait démontre qu’une seule intervention humaine est suffisante sur les annonces dématérialisées (enrichissement, correction) pour assurer une publication de qualité ; le service éditeur de la DJO étant garant du contenu, cette intervention ne doit porter que sur la mise en forme ;
– elle peut être effectuée directement sur écran et sans recours au support papier, ce qui nous permettra d’atteindre nos objectifs de réduction des délais de publication, et de faire l’économie de temps et de papier des tirages actuellement faits dans l’atelier.
Voilà. Bonne nuit les correcteurs. Comme ils n’ont pas d’écran, le problème est réglé. Plus sérieusement, que signifie cette agression caractérisée ? Le préfet, pas débile (on peut même dire qu’il se démerde plutôt bien, vu comme il arrive à entuber tout le monde), appuie là où ça fait mal : la division. Il fait miroiter à certaines catégories le travail enlevé à certaines autres, espérant qu’elles trahiront leurs camarades pour la bourse de Judas. Evidemment, vu comme ça, vu les divisions dans le Livre, vu la pitoyable journée d’action du jeudi 24 juin lors de laquelle une mobilisation unitaire s’est transformée en déroute « chacun pour sa gueule » (à l’exception de L’Huma), vu les stratégies corpo, individualistes et foireuses de certains dirigeants, vu tout ça on pourrait se dire que le préfet a raison. Mais c’est sans compter sur les ouvriers eux-mêmes : le livre est encore une force. La base ne se laissera pas manipuler. « Solidarité ouvrière », « conscience de classe », « lutte syndicale », ne sont pas de vains mots noyés dans l’individualisme triomphant. Non ?
Et plus prosaïquement, au cas où les principes ne comptent plus que pour du beurre, ceux qui pensent aujourd’hui se nourrir de la dépouille des correcteurs, se retrouveront à coup sûr demain eux-mêmes une dépouille, que d’autres dévoreront. Le festin n’est pas pour nous, et notre seul chance de ne pas être mangés est d’être solidaire.
Je n’ignore pas que ces décisions impliquent des changements significatifs par rapport aux pratiques actuelles, et des évolutions pour chacun des métiers impliqués dans la phase prépresse. Elles m’apparaissent néanmoins indispensables dans le cadre de la modernisation complète de notre chaîne de production. toutefois, pour assurer une parfaite continuité des processus de production, il me paraîtrait donc [sic] tout à fait normal d’opérer par étapes, en prévoyant le cas échéant de courtes phases expérimentales.
« Des changements significatifs », la liquidation d’une catégorie, il a le sens de l’euphémisme ! Modernisation ! Que de crimes on commet en ton nom !
Quoi qu’il en soit, je vous demande de m’indiquer avant le 14 juillet, après avoir évoqué les aspects techniques de ces questions avec M. Chabrol et ses collaborateurs compétents en réunion de production, les mesures que vous compter prendre pour mettre en oeuvre ces dispositions qui devront en toute hypothèse être complètement en vigueur avant la fin de cette année.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le président, l’assurance de mes sentiments les meilleurs, et cordiaux [« et cordiaux » rajouté manuscrit],
Jean-Paul Bolufer