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LA RAGE ET LA LUTTE ! PAS LA RÉSIGNATION
mardi 2 octobre 2007
DES RICHES DE PLUS EN PLUS RICHES PLUS RICHES,
DES PAUVRES DE PLUS EN PLUS PAUVRES
Le gouvernement l’a annoncé, il est en train de l’appliquer !
Les salariés, et en premier lieu les classes populaires, n’ont rien à attendre du nouveau gouvernement et de son programme. Dès le premier discours, le président a rappelé les idées qui fondent son projet de société : travail, autorité, morale, mérite, identité nationale... Autant de valeurs qui vont se décliner avec les intérêts des classes dirigeantes et possédantes et un projet de société réactionnaire et nationaliste. Inévitablement les inégalités vont continuer à se creuser, la précarité va se développer, le démantèlement des services publics et de la protection sociale va s’accélérer, le moralisme empreint de religion va renforcer son emprise sur la société et les dérives répressives et sécuritaires, dont les immigrés et sans-papiers sont les premières victimes, vont s’amplifier.
Toutes ces logiques vont s’articuler autour de mesures très concrètes qui risquent d’être mises en place très rapidement si on ne s’y oppose.
Face à cette situation, seule la construction d’un rapport de force sur le plan social peut changer les choses et éviter que la France ne connaisse à son tour le même sort ultralibéral que l’Angleterre des années 80 avec Thatcher. Il est nécessaire de rompre avec l’attentisme trop souvent de mise, de s’organiser et de répliquer pour bloquer le rouleau compresseur libéral et sécuritaire qui s’annonce, défendre ce qui reste des services publics et du système de protection sociale et peut-être aussi retrouver le chemin des conquêtes sociales. Ne comptons que sur nous-mêmes et sur nos luttes, au quotidien, dans nos quartiers et lieux de travail, pour faire émerger un mouvement social autonome, solidaire et émancipateur porteur d’une autre logique et d’un autre projet de société.
Le programme du gouvernement ?
Contre le droit du travail !
– Mise en place d’un contrat de travail unique (CTU) avec une période d’essai permanente, inspiré du CNE pour remplacer le CDI et tous les autres contrats de travail. C’est purement et simplement la précarité pour tous, une main d’oeuvre corvéable à merci sur laquelle plane la peur du licenciement, une insécurité de tous les instants.
– Exonération des charges sur les heures supplémentaires, le fameux “travailler plus pour gagner plus”, menant à l’abandon de l’idée de la réduction du temps de travail, mais aussi de l’idée d’embauche, le travail se faisant par les salariés en plus de celui déjà réalisé quotidiennement. Et gare à tous ceux qui oseraient refuser ces heures supplémentaires...
– Obligation d’activité pour les bénéficiaires de minima sociaux. Le retour du travail imposé, l’idée que les métiers les plus pénibles pourront être réalisés par les plus précaires : les bénéficiaires de la solidarité sociale !
– Allocations familiales sous conditions. Mettre des conditions, c’est trier les bonnes familles des mauvaises. C’est faire payer aux enfants, aux retraités, aux handicapés la supposée inefficacité de leur famille. C’est tout sauf de la soli-darité, une discrimination pure et simple.
– Instauration d’une TVA sociale, c’est-à-dire transfert d’une partie des cotisations patronales sur la TVA. Alors que tout le monde s’accorde à dire que c’est l’impôt le plus inégali-taire, le gouvernement décide de le renforcer. Les pauvres paieront pour les riches et les riches pour ?...
Contre les services publics !
– Poursuite des privatisations d’entreprises publiques. • Non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. De 35000 à 40000 postes supprimés, signifiant une baisse de la qualité et le développement de la précarité (santé, éducation, etc.).
– Fin de la carte scolaire (voir page 4).
– Introduction du concept de performance dans la fonction publique et rémunération au mérite.
– Fusion ANPE-Unedic, dans un premier temps, et appel à des organismes privés liés aux cercles patronaux pour gérer les dossiers des chômeurs. La solidarité entre les travailleurs au service des bénéfices privés !
Contre le droit de grève !
– Instauration rapide d’un service minimum garanti en cas de grève dans le service public.
– Obligation pour tout salarié de déclarer 48 heures à l’avance s’il sera gréviste ou non.
– Refonte de la représentativité des syndicats dans les entreprises.
Contre la “ classe dangereuse ” !
– Établissement d’une peine plancher en cas de récidive allant à l’encontre de la constitution française et de la législation européenne.
– Alignement progressif du statut pénal des mineurs sur celui des adultes.
– Restriction des sursis et des remises de peine.
– Construction de nouvelles prisons et de centres fermés pour les mineurs tels que les EPM.
– Application de la loi sur la prévention de la délinquance.
– Déclarations pendant la campagne présidentielle sur le caractère génétique de la criminalité ou de la pédophilie. Une absurdité scientifique qui nous ramène au thèses eugénistes d’une autre époque.
Pour les plus riches !
– Suppression des droits de succession. L’idée de succession est contraire au principe d’égalité en prédisposant chaque personne à bénéficier d’un capital plus ou moins important en fonction de sa famille. Les riches resteront donc riches
et les pauvres...
– Suppression de l’ISF (impôt sur la fortune).
– Allégement de la taxe professionnelle et par conséquent baisse des aides aux collectivités publiques.
– Bouclier fiscal à 50 % des revenus.
– Multiplication des zones franches. C’est-à-dire des zones sans règles financières ni sociales, des espaces de test de libéralisme effréné aux dépens du reste de la population.
Utilitariste vis-à-vis de l’immigration
– Pas de régularisation massive des sans-papiers. leur statut est bien trop utile au patronat et aux profiteurs de toute sorte. Le gouvernement souhaite donc par cette décision pérenniser le travail clandestin.
– Nouveau projet de loi sur l’immigration restreignant davantage le regroupement familial.
– Mise en place de quotas d’immigration, en fonction des compétences des individus et des besoins des entreprises en matière de main-d’oeuvre. C’est-à-dire faire de l’être humain une marchandise, le considérant uniquement comme une force de travail attribuée spécifiquement à un métier.
– Création d’un ministère de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Codéveloppement . La France est le seul pays européen avec l’Autriche à se doter d’un tel ministère. Souvenirs d’une époque pétainiste...
ASSURANCES SOCIALES ET FRANCHISES
On nous dit que les patrons n’embauchent pas parce que les “ charges sociales ” sont trop lourdes. Cela fait des années que le patronat travaille donc d’arrache-pied à s’exonérer de ses trop lourdes cotisations, fiscales (zones franches défiscalisées) ou sociales (contrats “aidés” et bientôt heures sup). Bien sûr il n’a jamais embauché plus pour autant. Et d’ailleurs, c’est quoi exactement ces fameuses “ charges sociales ”, dont on nous rebat les oreilles depuis des années ? Ces “ charges ”, comme les appelle le patronat, ne sont en réalité rien d’autre qu’une partie de nos salaires que nous, les travailleurs, avons décidé à un moment de notre histoire de mettre de côté en cas de coup dur (maladie, chômage) et pour nos vieux jours (retraite). Ces salaires, dits différés ou encore socialisés, sont composés de la part salariale et de la part patronale. Quand le patronat parle donc de “ charges ”, nous, nous parlons de “ cotisations ” ou encore “ d’assurances ”. Et d’assurances sociales, parce que les travailleurs y cotisent proportionnellement à leurs moyens pour pouvoir, un jour, en bénéficier. Rien à voir avec les assurances privées, dont le client bénéficie à hauteur de ce qu’il a payé. En s’exonérant de nos cotisations sociales, c’est donc d’une partie de nos salaires que le patronat s’exonère. On nous dit aussi que le déficit de la Sécu continue de se creuser, essentiellement parce qu’on est trop souvent malades, et qu’il va bien falloir qu’on prenne nos responsabilités et qu’on mette nous aussi la main au porte-monnaie pour nous soigner, en payant par exemple une franchise sur les actes médicaux, ou en n’étant plus remboursés d’une partie de plus en plus importante de nos soins. Mais cette Sécu, c’est nous qui la payons ! Et triplement puisque nous la finançons d’abord par nos cotisations, ensuite par nos impôts (CSG), enfin, et de plus en plus, par les déremboursements et franchises que patronat et gouvernement nous imposent. Finalement, le patronat nous fait combler un déficit de la Sécu qu’il a lui-même provoqué en ne s’acquittant pas de la part patronale de nos cotisations, sous couvert d’embauches qu’il n’a jamais créées.
TRAVAIL MINIMUM
Une des grandes lubies du gouvernement est la réforme du droit de grève par le biais du service minimum dans le secteur public, et particulièrement dans les transports. Nous ne pouvons que rappeler pourtant que des limites au droit de grève existent déjà dans la fonction publique (préavis, réquisitions, etc.). Il est intolérable de vouloir attenter à cet outil conquis de longue lutte en 1864 et constitutionnalisé en 1946. Dans un contexte défavorable aux salariés, cette attaque est d’autant plus dangereuse qu’elle supprimerait la seule arme efficace des travailleurs pour imposer leurs revendications. Par son impact, la grève signifie au patron et à l’État que l’on ne peut exploiter des hommes et des femmes sans craindre une réaction. Elle reste donc l’arme que nous privilégions pour imposer nos revendications. Cette réforme a aussi pour but, à long terme, de privatiser le service public. Ainsi, quand Thatcher a voulu privatiser les transports britanniques, elle a commencé le processus en attaquant le droit de grève. Sans compter que les grèves de cheminots défendent souvent les intérêts de tous les travailleurs (la Sécu en 1956, les retraites en 2003) et que leurs conditions de travail matérielles et humaines ont forcément des conséquences sur nos conditions de transport. Cette réforme constitue donc non seulement une attaque contre le droit de grève en général, mais aussi contre notre qualité de vie.
TRAVAILLER PLUS POUR GAGNER MOINS
Sarkozy dit : « Ceux qui veulent gagner plus doivent pouvoir travailler plus... » Nous répondons : « Travaillons tous et toutes, moins et autrement ! » Voilà bien l’illustration d’une réflexion capitaliste : demander aux salariés de travailler plus et plus longtemps s’ils veulent profiter des richesses créées. Comment dans ce cas prétendre vouloir baisser le taux de chômage, surtout si l’on ajoute à cela l’allongement de la durée du travail pour espérer avoir une retraite décente ? En effet, réduire le chômage, c’est créer des emplois stables et correctement rémunérés, donc réduire la durée hebdomadaire de travail, sans modulation ni annualisation. La loi des 35 heures n’a été qu’un cadeau de plus aux patrons : l’employé travaille plus vite (augmentation des cadences), se fait sucrer ses pauses (accentuant la fatigue et les risques), pour générer plus de rendement, et ce en un temps plus court (pour le même salaire bien sûr !). Loin de créer des emplois, cette loi a été une catastrophe. Face à cela, la CNT a toujours défendu l’idée d’une semaine de 28 heures (chiffre évalué en fonction de la densité d’actifs dans la population), le reste du temps permettant à chacun et chacune de se consacrer à son émancipation personnelle, activité par ailleurs elle-même créatrice d’emplois. Mais le patronat souhaite maintenir le chômage en place pour faire du chantage aux licenciements : « Tu n’es pas content, j’ai dix CV pour te remplacer ! » Ce discours associé à la précarité du futur contrat CTU ne permet pas aux salariés d’envisager sereinement l’avenir. Alors, fermer sa gueule... à vie ? Non il faut imposer l’idée que tout le monde travaille, moins et autrement. Même dans une logique économique capitaliste, cette idée est acceptable. Moins de chômeurs, c’est moins d’aides sociales donc moins de charges pour l’employeur, moins d’impôts, moins de prélèvements sur nos salaires bruts. Seulement s’il n’y a plus l’arme chômage pour imposer des cadences infernales et précariser les employés, ces derniers risquent fort à terme de se solidariser et de s’approprier l’outil de production... contre le patron ! Plus nombreux dans l’entreprise, conscients du travail fait et à faire, maîtres des outils et des procédés, l’idée de gestion directe de l’entreprise par les travailleurs se fera plus concrète et donc l’inutilité d’un patron plus flagrante. Toujours est-il que l’idée de la répartition et de la division des tâches est de plus en plus oubliée par les syndicats et les salariés. Chacun et chacune s’attache à son poste, son pré carré, comme un naufragé à sa bouée, plutôt que de partager avec son voisin. Pourtant nous y gagnerions tous et toutes. En temps, en qualité de vie, en loisirs et en santé. Il nous reste donc à organiser la division et la répartition du travail, et non à bosser plus au détriment de nous-mêmes et de nos collègues au chômage.
LOI DE LA PRÉVENTION DE LA DÉLINQUANCE
Au niveau des villes de plus de 10 000 habitants, cette loi renforce les pouvoirs de police et de justice du maire et étend son intervention dans des domaines réservés jusque-là aux professionnels du social de la santé et de l’éducation. Ces professionnels doivent désormais partager les informations qu’ils détiennent sur les usagers avec les élus. La loi prévoit aussi la mise en place d’un conseil pour les droits et devoirs des familles - qui est un véritable tribunal municipal -, ainsi que l’officialisation des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance au sein desquels la police, les élus et des professionnels s’échangeront des informations sur les personnes et familles dites en difficulté ...et certainement les militants trop gênants. En matière judiciaire, la jeunesse est une nouvelle fois visée. L’ordonnance de 45 qui donnait la primauté à l’éducatif sur le répressif pour les mineurs devient presque caduque. L’introduction de la présentation immédiate qui supprime tout temps éducatif avant jugement combinée à la nouvelle loi sur les peines planchers risque de remplir rapidement les nouvelles prisons pour mineurs. Enfin, outre une multitude de dispositions qui renforcent le fichage et le contrôle des personnes, on peut relever l’attaque faite aux salariés des transports qui pourront désormais voir débarquer la police sur leur lieu de travail s’ils sont soupçonnés de consommation d’alcool ou de drogue. Avant la loi, c’était la médecine du travail et les CSHCT qui intervenaient lorsque des salariés rencontraient des difficultés de ce type.
LA CARTE SCOLAIRE ACCUSÉE DE SÉGRÉGATION C’EST LE MONDE À L’ENVERS !
– 1. Attention ! Leçon de manipulation !
Pour promouvoir l’égalité sociale, le nouveau gouvernement vient d’annoncer la suppression progressive de la carte scolaire en trois ans tout en permettant aux familles de la contourner dès la rentrée prochaine. Ne pas s’intéresser aux causes premières : mise en place en 1963, elle pose comme principe qu’un enfant soit scolarisé dans un établissement en fonction de son lieu d’habitation. La mixité scolaire n’est donc qu’une conséquence de la mixité urbaine. S’il existe des ghettos scolaires dans certains quartiers, c’est bien parce que les populations les plus défavorisées s’y retrouvent, les loyers étant moins chers et l’offre de logements sociaux plus importante qu’ailleurs. On ne peut répondre à ces inégalités géographiques qu’en construisant des logements sociaux en nombre suffisant dans tous les quartiers et en plafonnant les loyers.
– 2. Favoriser les classes moyennes : les dérogations déjà existantes profitaient majoritairement aux classes favorisées puisque ce sont elles qui ont le plus de ressources et d’informations sur le système scolaire. Pour ces mêmes raisons, la suppression de la carte scolaire va bénéficier aux mêmes et conduira, comme en Belgique ou aux Pays-Bas, à un renforcement de la ségrégation scolaire.
– 3 Flatter la liberté individuelle : l’année prochaine, davantage d’élèves pourraient choisir leur établissement. C’est oublier qu’il y a un nombre de places limitées dans chaque établissement, et que les critères sont suffisamment flous pour que les lycées sélectionnent les dossiers qui les intéressent. Privés de leurs meilleurs élèves, les difficultés des établissements des ZEP n’en seront que plus grandes.
Malgré les contournements, la carte scolaire est donc le dernier rempart qui permet aux ZEP de garder les rares élèves issus des couches favorisées. Le gouvernement répond à une ségrégation sociale déjà existante en favorisant les plus favorisés et en désarmant les plus faibles pour mieux les stigmatiser. Face à ce redoutable rouleau compresseur idéologique qui érige une société de classes toujours plus individualiste et refermée sur elle-même, dénonçons les mensonges de ceux qui nous gouvernent, montrons que la lutte collective paye en nous organisant sur nos lieux de travail et dans nos quartiers.
Avec eux, c’est le monde à l’envers. Alors, prenons-les au mot et renversons leur monde !