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SIPM

Droit de grève

publié dans Ca presse HS2

lundi 13 octobre 2003

Le droit de grève, un droit durement acquis. Et qu’il s’agit d’utiliser !

Depuis 46, le droit de grève est constitutionnel. Le préambule de la constitution de la Ve République (4/10/1958) se réfère à celui de la IVe (27/10/1946) : « Le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le réglementent. »

Cependant, dès 1963, il est restreint. En 1979, le Conseil constitutionnel devra intervenir, la loi de 1974 sur l’audiovisuel niant ce droit. Aujourd’hui, prétextant un intérêt général par ailleurs bradé à des intérêts privés (services publics), de nouvelles restrictions sont envisagées.

Principes

Grève : cessation collective et concertée du travail par le personnel, dans le but de défendre des revendications de nature professionnelle (à l’exclusion de motivations « politiques »). L’article L521-1 du Code du travail précise que la grève ne rompt pas le contrat de travail (c’est une suspension du contrat de travail) et que l’employeur ne peut prendre de sanctions pour un fait de grève. En cas de licenciement, une action en justice en entraînerait l’annulation.

Se mettre en grève

Une grève n’a pas de durée minimale ou maximale. Elle peut être déclenchée à tout moment (sauf spécifications législatives particulières), par des salariés syndiqués ou non. Une obligation : transmettre au préalable au patron les revendications. Il peut aussi s’agir d’une grève de solidarité avec d’autres salariés de la même entreprise (dans certains cas). Ou d’une grève se situant dans le contexte d’un mouvement plus large (Sécu en 1995, retraites en 2003) : dans ce cas, un salarié de l’entreprise peut se mette seul en grève. Dans tous les cas, il n’est pas nécessaire que les grévistes soient majoritaires dans l’entreprise. En résumé, la cesation du travail doit être :
 totale (interdiction des grèves perlées),
 collective (un seul salarié ne peut faire grève - sauf en cas d’appel national -, mais la grève peut être très minoritaire, au moins deux salariés). Si l’entreprise ne compte qu’un salarié, il peut faire grève : Cass. soc., 13 nov. 1996, no 93-42.247, Direr c/ Bolard ;
 concertée (les salariés doivent s’être concertés),
 elle doit répondre à des revendications d’ordre professionnel (au sens large : une grève contre la politique sociale du gouvernement est possible).

Restrictions

Dans le secteur public : préavis de 5 jours. Les lois 74-696 du 7/08/74 et 79-105 du 25/07/79 (Conseil constitutionnel) obligent à un service minimum le service public de radio et de télévision : diffusion d’un JT et d’une émission de divertissement par jour. Mais la mise en concurrence de ces secteurs a limité les astreintes, et la loi n° 86-1067 du 30/09/86 (loi Léotard, relative à la liberté de communication) prévoit seulement la continuité technique de la diffusion, à la charge des sociétés nationales de programme et de TDF.
Entrave au travail des non-grévistes, séquestration, grève illégale... sont des fautes lourdes pouvant justifier le licenciement du gréviste, voire ayant des conséquences pénales.

Occupation des locaux

Qu’il s’agisse de l’occupation des locaux ou du piquet de grève, cela est légal (cass. soc. 26 février 1992, BC V n° 124) tant que les salariés non-grévistes ne sont pas empêcher de travailler (cass. soc. 21 juin 1984, BC V n° 263) et que la sécurité des personnes et des biens n’est pas en cause (cass. soc. 26 février 1992, BC V n° 125). Une occupation illégale peut être constatée par huissier, le juge des référés peut ordonner l’évacuation et la police s’en charger. Les salariés s’exposent à un licenciement pour faute lourde.

Remplacement des grévistes

Le patron n’a pas le droit de remplacer des grévistes par du personnel précaire (CDD, intérimaires...). En revanche, il peut recourir à du personnel en CDI : de nouveaux embauchés, de la sous-traitance ou du personnel "prêté" par une autre entreprise.

La grève, un outil révolutionnaire

La grève sert à obtenir des améliorations pour les salariés d’une entreprise. Elle sert à obtenir des améliorations sociales ou empêcher des régressions (1936, 1968, 1995). Dans une perspective syndicaliste révolutionnaire, la grève est l’instrument ultime de lutte de classes, expression d’un rapport de force collectif qui, simultanément, démontre le rôle vital de ceux qui produisent et l’inutilité de ceux qui s’accaparent la plus-value. En relançant la production pour leur bénéfice propre, sous leur contrôle, les travailleurs peuvent transformer la grève en grève expropriatrice, abolir le salariat et les classes sociales.