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SIPM
Dadvsi : quels enjeux pour les auteurs ?
mercredi 18 janvier 2006
On entend beaucoup qu’il s’agit de protéger les droits d’auteurs... La réalité est tout autre : cette loi accompagne l’extension des droits de l’entreprise au détriment de l’auteur.
Issu d’un traité international transposé ensuite dans le droit communautaire, Dadvsi (Droits d’auteurs et droits voisins dans la société de l’information) devrait maintenant l’être dans le droit français. C’est compter sans la résistance à cette loi originellement dictée par les multinationales à l’administration Bush.
De quoi s’agit-il ? D’abord d’autoriser les DCU, des systèmes empêchant la copie. Ensuite de pénaliser leur contournement (3 ans de prison et 300 000 euros d’amende). Divers moyens sont déjà utilisés pour empêcher ou contrôler la copie privée et la diffusion des œuvres : traçage des usages, dégradation de la qualité des œuvres, identification de l’utilisateur, interdiction de copie ou de transfert d’un support à l’autre ou d’un logiciel à l’autre, autodestruction de l’oeuvre après une période donnée, etc.
Ce qui est en jeu n’est absolument pas le respect du droit d’auteur, contrairement à ce que voudraient faire croire les multinationales, qui mettent en avant une dizaine de stars pour légitimer leur diktat. Au contraire, ce type de mesures venues des pays anglo-saxons accompagnent d’autres mesures remettant en cause le principe du droit d’auteur français au profit d’un droit sur l’œuvre (qui intéresse les multinationales) : offensive de 2002. Dans cette dernière attaque contre les droits d’auteur déjà, il s’agissait de transcrire une directive européenne en droit français.
Le droit à la copie privée deviendrait un délit, et pour les consommateurs il faudrait jongler entre des fichiers et des supports non-compatibles, ce qui obligerait à racheter plusieurs fois la même œuvre pour l’écouter sur l’ordinateur, la chaîne et dans la voiture, voire sur deux ordinateurs différents ou dans des logiciels de marques concurrentes... La tentative de contourner ces blocages (copier une chanson achetée sur une K7...) devient avec le DADVSI un délit passible de trois ans de prison et de 300 000 euros d’amende...
Par ailleurs, le DADVSI légaliserait l’installation de logiciels espions par les multinationales permettant de communiquer des données personnelles directement de l’ordinateur de l’utilisateur. Ce qui en jeu tient donc également des libertés publiques.
Mais ce sont aussi les logiciels libres qui se trouvent directement en ligne de mire, et particulièrement le système d’exploitation libre Linux, dans un environnement déjà largement dominé par Windows. Le logiciel libre étant par définition « open source », c’est-à-dire laissant un libre accès de l’utilisateur au « langage » qu’il utilise, les utilitaires anticopie pourraient facilement y être désactivés. L’utilisation du libre deviendrait donc un délit...
Pour toutes ces raisons, nous devons faire barrage au projet de loi DADVSI, et défendre le modèle français du droit à la copie privée, garant des libertés individuelles et des libertés collectives face à des multinationales toujours plus exigeantes.
Les droits des auteurs doivent être développés dans ce cadre, par l’affirmation de leur primauté sur les entreprises qui diffusent leurs oeuvres et par le reversement d’une taxe sur les supports vierges, adapatée à Internet. Les bénéfices colossaux qui se réalisent ne servent ni la grande majorité des auteurs ni les usagers : c’est à ce niveau que réside le scandale. La régression sociale que représenterait l’adoption de la DADVSI ne ferait que conforter la position dominante des multinationales, face à des auteurs toujours plus fragiles.
Plus d’info :
– le site de mobilisation contre le DADVSI
– Un décryptage du DADVSI