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Collectif pour la liberté de la presse en Algérie
Alerte sur les nouvelles condamnations de journalistes en Algérie
mercredi 10 novembre 2004
La répression contre les journalistes s’aggrave en Algérie. Par ailleurs, le collectif s’interroge sur l’interdiction du meeting prévu à la Bourse du travail.
Alors que les panaches de la célébration de la cinquantaine du 1er novembre flottaient encore dans l’air d’Alger, la répression frappait de nouveau la presse indépendante. Le 2 novembre, Mohammed Benchicou devait répondre dans deux nouvelles affaires de diffamation, pour lesquelles la justice s’était étrangement autosaisie. De nouvelles condamnations le menacent.
Condamné à deux ans de prison, incarcéré à la prison d’El Harrach depuis le 14 juin, le directeur du journal Le Matin, quotidien interdit de parution depuis le 24 juillet sous le prétexte notoirement fallacieux de créances à l’égard de l’imprimeur,semble catalyser toute la hargne vindicative du pouvoir algérien à l’égard de cette presse qui a payé le prix de sa liberté de ton. Saida Azzouz, journaliste au Matin, risque six mois de prison ferme. Fouad Boughalem, directeur de quotidien Le Soir d’Algérie, risque, lui aussi, six mois de prison ferme. De nombreux autres procès sont suspendus comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête des journalistes de la presse indépendante.
Comme dans les années de sang au cours desquelles le terrorisme islamiste avait entrepris de décimer la presse par des attentats contre les journalises, la presse indépendante est de nouveau forcée de faire sa propre actualité, à cette différence notable qu’aujourd’hui les journaux privés sont suspendus sous n’importe quel prétexte, comme cela a été le cas pour Le Matin et comme c’est une menace permanente pour tous les autres. Cette répression n’est pas sans rappeler l’ère hégémonique du parti unique du F L N post-indépendance. Comme alors, toute revendication sociale, démocratique, culturelle, syndicale ou politique est réprimée violemment et ses auteurs emprisonnés. Une vague d’arrestations s’est abattue ces jours-ci, frappant indistinctement des mouvements contestataires de citoyens, des syndicalistes, et des jeunes à travers tout le pays. Nous ne pouvons dissocier la volonté du pouvoir de museler la presse indépendante des atteintes quotidiennes aux libertés individuelles et aux droits des citoyens chèrement acquis au lendemain de l’insurrection nationale d’octobre 1988.
Face à cette dérive despotique d’un régime qui a fait classer l’Algérie parmi les pays les plus corrompus de la planète, le risque de « soumission ou de disparition » des journaux démocratiques algériens est à craindre. Seule une presse libre peut informer et éclairer les opinions.
Devant une telle situation, le Collectif pour la liberté de la presse en Algérie tient à alerter sur les risques de neutralisation de toute parole dissonante. Il appelle à la mobilisation la plus large pour :
– La libération immédiate de Mohamed Benchicou et de Hafnaoui Ghoul.
– L’arrêt des poursuites judiciaires à l’endroit des journalistes
algériens.
– La reparution immédiate du Matin.
– La dépénalisation des délits de presse conformément aux
recommandations des Nations- Unies.
– La libération des prisonniers politiques actifs dans les mouvements
citoyens.
Paris le 03 Novembre 2004
Déclaration à propos du meeting du 28 octobre
Le meeting de soutien à Mohamed Benchicou et à Ghoul Hafnaoui programmé le 28 octobre 2004 à la Bourse du travail, rue du Château-d’Eau à Paris, n’a pu s’y tenir, suite à une « déprogrammation » surprise décidée par la commission administrative de ladite Bourse, communiquée aux organisateurs une heure avant le début de la réunion par. les employés chargés de l’accueil, et toujours officiellement inexpliquée,
En arrivant sur les lieux de notre meeting, nous étions assurés de la réservation de la salle Ambroise Croizat obtenue le 5 octobre grâce au syndicat CGT des correcteurs, membre de la Fédération du Livre particulièrement concernée par les problèmes de la presse.
Nous espérions par cette rencontre publique élargir les rangs de ceux qui sont attachés à défendre la liberté de la presse et d’opinion partout où elles sont malmenées, et particulièrement en Algérie, soulever la chape de silence qui contribue à banaliser l’emprisonnement de journalistes, qui entoure la mise à mort du journal le Matin et occulte la menace qui pèse sur le devenir de la presse indépendante algérienne.
Quelle que soit la qualité des donneurs d’ordre et les raisons qui ont motivé leur décision, nous membres du Collectif pour la liberté de la presse en Algérie considérons le refus de nous autoriser à tenir notre meeting au lieu convenu comme une censure politique brutale et intolérable contre notre manifestation. Nous déplorons cette mesure d’interdiction dont nous pouvons affirmer qu’elle n’aura d’autre incidence que de nous conforter dans notre engagement à face à l’arbitraire.
Le collectif pour la liberté de la presse
Paris le 4 novembre 2004